Le télescaphe de Callelongue

Une carte postale du télescaphe. Au fond, l'île Maïre.

Le télescaphe. Ce nom revient régulièrement dans la presse marseillaise, notamment au début des mois d’avril, sur un ton de galéjade. Pourtant, on imagine mal aujourd’hui l’immense défi qui attendait Denis Creissels et James Couttet, quand ces deux « montagnards » sont descendus à Marseille, au milieu des années 60, avec l’idée folle d’y construire le premier téléphérique sous-marin du monde pour pouvoir « visiter les fonds marins en complet veston ».
Ce projet est emblématique d’une époque où l’imagination et l’audace primaient encore (pour le meilleur, mais aussi parfois le pire) sur les normes de sécurité drastiques ou autres principes de précaution…
L’exploitation du télescaphe ne durera au final qu’une année, entre l’été 1967 et 1968. On a évoqué des difficultés financières, un peu moins des incidents plus fréquents que l’on veux bien le dire.
Depuis quelques années, des rumeurs de reconstruction se font de plus en plus persistantes. Mais jusqu’à présent, personne n’a osé franchir le pas.

Notre reporter a retrouvé, sur les lieux mêmes du télescaphe où l’on peux encore y apercevoir des vestiges, un vieux pêcheur qui a connu l’œuvre des savoyards. Voici son témoignage (nous avons retranscrit fidèlement le langage « imagé » du vieux pêcheur, avec la traduction quand cela s’avérait nécessaire.)

« Au milieu des années 60, deux estrangiés de la montagne ont eu l’idée de construire un téléphérique pour aller au fond de l’eau. Ils sont venus ici, à Callelongue car le coin y était cafi de poissons! [parce que la contrée regorgeait de poissons]

Dès l’année 1967, on pouvait, pour 12 francs [soit 16,80 € corrigés de l’inflation observée entre 1967 et aujourd’hui] descendre à 10 mètres sous l’eau. Je peux te dire qu’on était un moulon à vouloir le faire! Et il fallait faire la queue en plein cagnard! « [La demande était forte, et il fallait patienter au sein d’une file d’attente, et ce, sous un soleil écrasant]. On pouvait monter à six dans l’une des quatre cabines et s’il y avait des bestiasses parmi nous, on était un peu esquiché. [si des personnes de forte corpulence prenaient place parmi nous, l’espace vital de chacun s’en trouvait considérablement altéré.]

La cabine se soulevait comme une cloche à fromage, comme ça on pouvait s’installer sans trop se fatiguer. Chaque cabine pesait 3 tonnes.
Pour faire un parcours de 500 mètres sous l’eau, on mettait 10 à 15 minutes à peu près. En une heure, une soixantaine de personnes pouvaient profiter de la vue sous-marine.
On était de longue surveillé par des hommes grenouille, ce qui fait qu’on pouvait pas se néguer. [Nous étions continuellement surveillés par des hommes grenouille, et de ce fait, toute possibilité de noyade était réduite à la portion congrue.]

Et ça marchait même la nuit! Et quand c’était fini, ils nous remettaient une carte de baptême de plongée. On était fier comme un bar tabac. [On était fier comme Artaban]
Seulement, l’année suivante, en 1968, par manque d’argent et de soutien, ils ont dû fermer boutique. C’est vrai que ça demandait beaucoup d’entretien. On dit même qu’il y a eu un incident qui a un peu mouillé les passagers et douché l’enthousiasme des futurs volontaires.
On a quand même été à peu près 31 000 à être montés dans le télescaphe!
Ça leur avait couté plus de 2 000 000 francs cette histoire! Et pourtant, ils avaient d’autres projets, comme ce téléphérique vers le sommet de l’ile Maire, juste en face, peuchère!… »

A voir aussi

Flyer du télescaphe
Certificat de baptême du télescaphe

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